Avec la série « Enfance Gâchée »… enfin, j’ouvre la porte du secret si bien gardé…
Enfant,
ma vie a basculé, bousculée par un adulte qui n’est pas resté à sa
place. Des années de silence, enfermée dans le non-dit, et sauvée par
une mémoire sélective que mon instinct de survie a mis en place. Des
images angoissantes remontent de temps à autre à la surface mais « chût »
encore et toujours. Je résiste sur une corde de plus en plus raide et
puis il y a « Julie et Mélissa »… la vérité explose à l’intérieur de moi
mais je dois la contenir… ne rien dire, fuir de tout son être,
s’endormir et ne pas se réveiller parce que ça fait trop mal !
«
Enfance gâchée », « Enfance Volée » pour ne pas dire « violée », le
choix des mots n’est pas simple quand on est écrasé par un silence
imposé depuis toujours. Avec « Enfance Gâchée » je crie ma douleur
d’enfant propulsée dans le monde des adultes. C’est le seul moyen que
j’ai trouvé pour me libérer du secret si bien gardé. Les images ont le
pouvoir de parler, de hurler en silence, ce silence qui m’a été imposé
depuis trop d’années. Alors, je dessine, je peins, je grave la douleur
enlisée en moi et je vous délivre mon histoire !
Le
besoin de parler, de hurler est si fort mais je suis muselée par le
jugement des autres et surtout de ceux que j’aime et qui auraient dû me
protéger…ils ne savaient pas, maintenant ils savent.
Le
lino, ce morceau noir, aussi noir que ces années où j’ai marché sans
voir l’issue du gouffre dans lequel on m’avait poussée. Le dessin à la
craie directement sur cette surface lisse et froide. Le travail de la
gouge, ma gorge se serre, ma respiration s’accélère…place à la colère,
à la violence ! Mes gestes deviennent de plus en plus rapides, la
rage s’empare de moi…je trouve le chemin qui mène à la libération.
L’adulte
est fait de l’enfant qu’il a été et l’enfant construit l’adulte qu’il
deviendra. Adulte ou enfant, en chacun de nous il y a un être fragile
qu’il faut préserver.